Pour célébrer la Journée internationale des femmes et des filles de science, qui a lieu le 11 février, nous publions l’ interview de Sabrina Ihaddaden et vous invitons à relire celui de Sabrina Andiappane. Ce sont deux jeunes scientifiques, brillantes ingénieures et modèles inspirants pour montrer aux filles que les sciences de l’ingénieur c’est aussi pour elles. On peut s’y épanouir, faire un métier qui plaît, travailler à l’étranger ou sur de grands projets européens, faire traverser des trains du futur sous Londres ou envoyer des engins super performants dans l’espace.
Avec Zena Musoki, ingénieure chimiste, Flore Wegman ingénieure en électronique, Marie-Sophy Pin, ingénieure également , les deux Sabrina ont fait partie du groupe participatif « Allez les Filles », organisé par Universcience en 2010 pour donner leur point de vue sur les obstacles rencontrés par les filles dans les filières scientifiques. Puis elles ont monté avec le soutien Universcience le blog « Allez les filles Osez les sciences » pour donner confiance en elles aux jeunes étudiantes en sciences et les inciter à choisir des filières, comme les sciences de l’ingénieur où les filles sont encore minoritaires. Elles sont 28% dans les écoles d’ingénieur.
Titulaires d’un diplôme d’ingénieur, elles réussissent brillamment dans leur début de carrière et ont déjà décroché des prix importants pour récompenser leur parcours.
Nous leur donnons la parole pour encourager toutes les filles qui aiment les sciences et les technologies à suivre leurs traces.
Sabrina Ihaddaden, brillante jeune ingénieure française, travaille actuellement au Royaume-Uni chez Bombardier, grande entreprise internationale qui fabrique notamment des trains et des avions.
Lauréate en 2008 du Prix de la « Vocation Scientifique et Technique des filles », décerné par le Ministère des droits des femmes aux lycéennes qui choisissaient de s’orienter dans des filières où les filles sont moins de 40%, Sabrina Ihaddaden a participé aux côtés de Sabrina Andiappane, ingénieure dans le spatial, Zena Musoki, ingénieure chimiste, Marie-Sophy Pin et Flore Wegmann ingénieures également, au groupe participatif « Allez les filles » réuni par Universcience en 2010. Ces jeunes femmes ont ensuite monté, avec le soutien d’Universcience, ce blog « Allez les filles, osez les sciences ».
Sabrina, lauréate en 2013 du prix « Award for the Young Achiever 2013 » décerné par le Chartered Management Institute (CMI) et fin 2017 du le prix « Young Rail Professional » au Royaume Uni, est passionnée par son métier : concevoir les systèmes de signalisation de trains qui roulent plus vite, sont plus sûrs et sont plus performants. Une inspirante rôle modèle.
Après le bac, quelle filière avez-vous choisie ?
Après un bac S option physique-chimie, j’ai choisi de poursuivre des études d’ingénieur, bien qu’à l’époque, mon entourage m’ait recommandé de me méfier car les études d’ingénieur sont des filières majoritairement masculines. Loin de me décourager, j’ai décidé de relever le challenge et me suis inscrite en DUT en Génie Electrique et Informatique Industriel, à l’IUT de Cachan, où nous n’étions que 4 filles sur 100. J’ai ensuite passé des concours et ai intégré les Arts & Métiers ParisTech, au centre de Lille. J’ai eu l’opportunité de faire ma dernière année à l’étranger et j’ai choisi de me spécialiser en mécatronique, à l’Université de Lancaster, au Royaume Uni.
Quand avez-vous décidé de devenir ingénieure et pourquoi?
Durant ma dernière année de lycée, j’ai réalisé que je voulais comprendre comment fonctionnent les appareils technologiques car nous en sommes entourés. Je trouvais cela dommage de les utiliser tous les jours sans savoir comment ils marchent, c’est pour cela que je suis devenue ingénieure.
Avez-vous connu des doutes ?
Des doutes, toujours. Je me souviens quand je me préparais pour les concours aux écoles d’ingénieur, je ne savais pas du tout où me positionner par rapport aux autres candidats et j’avais postulé dans énormément d’écoles, de peur de me retrouver sans rien. J’ai finalement intégré les Arts & Métiers ParisTech à Lille. Un magnifique tremplin pour arriver au job de mes rêves ! Je pense qu’il ne faut jamais se décourager et toujours persévérer afin de trouver sa voie.
Pourriez-vous nous en dire plus sur les Arts & Métiers ParisTech ? Quelles options avez-vous choisies et pourquoi ?
Les Arts & Métiers ParisTech est une école d’ingénieur généraliste, spécialisée en génie mécanique et industriel. Le recrutement se fait post Bac + 2 après une prépa scientifique et technique, un DUT, un BTS ou une Licence. Les Arts & Métiers ont des centres un peu partout en France, j’ai rejoint le centre de Lille, un magnifique bâtiment historique.
Votre parcours académique vous a-t-il permis de voyager ?
J’ai eu la chance de passer ma 5e et dernière année d’études supérieures en Angleterre et ai choisi de me spécialiser en mécatronique, filière où nous n’étions que 2 filles. Cette année passée en Angleterre a été très enrichissante et je me suis beaucoup investie dans la vie étudiante de l’université de Lancaster. Je suis même devenue présidente des étudiants de Masters et Doctorats.
Les filles semblent être très sous-représentées dans les filières que vous avez choisies, cela a-t-il été un problème pour vous ?
Tout au long de mon parcours scolaire et professionnel, le taux de femmes variait entre 25% et 4% maintenant. J’ai fait de ma singularité ma force. Il n’est pas rare que l’on pense que je représente le service des ressources humaines ou des achats quand j’arrive dans une réunion où les hommes sont majoritaires. Cela me fait sourire de voir leur étonnement quand ils réalisent que je représente l’équipe d’ingénierie !
Avez-vous trouvé rapidement un job après votre diplôme ?
Après ma 5e année, je suis restée en Angleterre puisque j’ai choisi de rejoindre un « graduate program » chez Bombardier Transport, programme de 2 ans dédié aux jeunes diplômé.e.s pour leur permettre de découvrir les différents types de métiers. Ce programme m’a permis de choisir la spécialisation qui m’a toujours plu : la signalisation.
Quelle est la place des femmes chez Bombardier ? Existe-t–il des politiques mises en place en faveur de la mixité ?
Selon l’organisation « Women In Rail », il y a environ 16% dans le ferroviaire au Royaume Uni, et 4% sont ingénieures. Un réseau de femmes travaillant chez Bombardier est actif, ce qui peut rassurer des femmes postulant dans l’entreprise.
Quels sont les aspects qui vous plaisent le plus dans votre travail ?
J’apprécie particulièrement le sentiment de faire quelque chose d’utile pour la société puisque les projets sur lesquels je travaille contribuent directement à améliorer les transports ferroviaires de milliers de citoyens. Le travail en équipe et le relationnel clients et fournisseurs sont aussi des aspects qui me plaisent beaucoup. Et puis la fierté de voir son premier projet entrer en service à Londres !
Sur quels projets travaillez-vous en ce moment ?
Le projet Crossrail est le plus gros projet sur lequel je travaille actuellement et me permet de développer mes connaissances sur le matériel roulant. C’est un train qui traversera Londres d’Est en Ouest et qui augmentera la capacité du réseau de 10%, et sur lequel la signalisation est particulièrement complexe. Nous avons également remporté cinq autres projets de matériel roulant pour Londres pour lesquels je suis responsable de l’intégration des équipements de signalisation à bord des trains.
Vous semblez passionnée par votre métier, est-ce important pour vous de transmettre votre goût des sciences aux jeunes ?
Absolument. Je suis engagée dans une association, la «Young Rail Professionals », que j’ai d’ailleurs dirigée pendant plusieurs années, et qui promeut les métiers du ferroviaire auprès des jeunes. J’ai l’occasion de rencontrer des étudiant.e.s dans les collèges, lycées et universités au Royaume-Uni pour promouvoir l’ingénierie ferroviaire, souvent délaissée par les jeunes diplômé.e.s au profit des filières automobiles et aérospatiales.